Instant de vie chez les Bouchard

Instant de vie chez les Bouchard
Claude Mattheau, 2014

dimanche 9 novembre 2014

"Je vous aime et je ne vous oublierai jamais."

J'ai tant écouté Languirand à la radio qu'encore aujourd'hui , sa voix, même si elle s'est tue, m'est restée familière . Pour moi Languirand , c'est une tonne de documents dont je n'aurais jamais entendu parler sans son intervention. Ce sont des réalités nouvelles auxquelles j'avais accès à travers sa voix chaude et son rire apaisant.
Languirand, c'est un vulgarisateur extraordinaire. Un homme dont la curiosité était comme un virus et j'étais, moi, une de ses répliques.

Je ne vais pas lui rendre hommage. D'autres l'ont fait déjà. Et à sa mort, on partira le tape qui est sur pause et toute sa vie sera résumée en deux ou trois minutes au téléjournal. L'essentiel de Languirand en peu de temps...

Heureusement , vous pouvez toujours lire ce livre magnifiquement bien documenté : mais là, ce sera un peu plus long que de regarder le téléjournal.

Ma mère souffre de l'alzheimer . Languirand aussi.




"Je vous aime et je ne vous oublierai jamais."


Ma mère aussi croyait cela. Mais ce n'est pas ce qui s'est passé. Et ce n'est pas ce que vivra monsieur Languirand. Ma mère occupe aujourd'hui  une chaise gériatrique et ne nous reconnaît guère. Je dis guère parce que je n'ose dire jamais.Parce que ce serait comme la condamner au néant et je ne veux surtout pas que ce soit de ma bouche que le mot jamais sorte . Je sais . c'est bête.



Quand ma mère est tombée malade , je suis tombé avec elle et j'ai débuté le journal de la maladie de ma mère. En voici un extrait.

Journal sporadique de la maladie d’Alzheimer de ma mère.
6 juin 2006 

Ma mère, maman. Si ces mots que j'ai si souvent dits ne veulent plus rien dire à son oreille, devrai-je continuer de les dire ? Je suis partagé entre la honte et la colère. Cette femme est ma mère et elle ne l'est plus, j'ai honte de ne pouvoir traverser ce chemin qui nous sépare: elle est de l'autre côté et moi, je tarde à l'y rejoindre ! C'est ma colère qui m'empêche de l'accueillir. Je ne veux pas que ma mère disparaisse dans ses souvenirs ,qu'elle perde les mots qui la distinguent, qu'elle s'efface avec la maladie. Non, je ne veux pas !




Elle, qui parlait tant. Avec la justesse de ses expériences, la noblesse de ses sentiments; elle me quitte lentement et tout ce que j'ai à lui offrir, c'est ma colère parce que je ne comprends pas...Et pourtant, ce n'est que le tout début de la maladie.

(...)

J’ai perdu mon père, subitement, au bout de son cœur et voilà que je perds ma mère, lentement, au bout de sa mémoire.

Depuis j'ai bien cheminé , je pourrais dire que grâce à Languirand, j'ai trouvé moi aussi, mes quatre chemins.



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