Instant de vie chez les Bouchard

Instant de vie chez les Bouchard
Claude Mattheau, 2014

mardi 27 avril 2021

Nostradamus de passage au village pour enseigner -


 QUI EST RENÉ TREMBLAY ?


Né en 1919 sur la rue Cuvillier à Montréal, M. Tremblay est devenu orphelin à 14 ans. Ses grands-parents de Charlevoix ainsi qu'un oncle de Chicoutimi ont accueilli la famille de trois enfants. À Saint-Urbain où il demeure, le jeune Tremblay fréquente des classes mixtes, en raison du nombre peu élevé d'élèves. Après avoir fréquenté l'École normale Laval de Québec, il termine ses études en 1938 après avoir décroché un diplôme supérieur.

 En septembre de cette année-là, il devient enseignant aux Grandes-Bergeronnes dans une école pas plus grande qu'une maisonnette pour oeuvrer auprès de 26 jeunes garçons de 4e, 5e, 6e et 7e année.



Ce René Tremblay  se maria avec Suzanne Gauthier rencontrée au village et quitta Grandes-Bergeronnes en 1941  vers le Saguenay où il fit  carrière dans le monde de l'enseignement supérieur. Il est décédé en 2012 à l'âge de 94 ans.

Chose étonnante, il participa pour s'amuser à prédire l'avenir technologique et ce à partir de ses connaissances en pédagogie. Il misa assez juste. Ces prédictions qui remontent à 1975 comprenaient : l'enseignement à domicile par Internet , le sans-fil et  les magnétoscopes  !   

En 2000, année de cet article de publié dans le Progrès -Dimanche, il dit avoir été trop rapide en ce qui concerne les voitures électriques et le téléphones visuels ... Il croyait toujours qu'un jour le Saguenay serait navigable tout l'hiver  grâce à des coques chauffantes dont seraient munies les navires;  le réchauffement climatique rendra obsolète son idée ! 





*Par contre il se trompe quant à l'ordination des femmes et le mariage des prêtres ! Il y a des résistances plus fortes en matière de religion qu'en science !* 




Prédiction pour 2025 : le téléphone cellulaire  avec appli !






lundi 26 avril 2021

1980 La coop forestière en quête d'une régionalisation

Progrès-Dimanche , 9 mars 1980

 





Cours d'été au Lac Gobeil

   



😊😊La première fois que j’ai entendu le mot sylviculture, j’avais 17 ans et je venais d’obtenir mon premier emploi d’été. À 3.47 $ de l’heure, je passerais un été de richard. C’était à l’été de 1978. Pour que vous compreniez bien ma richesse estivale, sachez que mon père, laitier, livrait un litre de lait pour 33 cents ! Une bière coûtait 60 cents au Manoir Fortin et 4.10 pour une caisse de douze à l’épicerie chez Marc Tremblay

Or, le mot sylviculture ne me disait rien. Ce n’était pas encore un mot qu’on utilisait couramment. Mais à la fin de mon été chez mon employeur d’occasion, soit la Coopérative forestière de Bergeronnes - Unité de gestion 91-, non seulement aurai-je appris un peu de latin, mais je me serai fait driller par nul autre que le président de la Coop forestière, Clément Gagnon

Logo festif qui souligne cinquante
années de coopération 

Le projet pondu par Clément consistait à mettre en valeur la plage du lac Gobeil, d’y installer des tables de pique-nique, des poubelles, de nettoyer les petits affluents qui oxygénaient le lac, de voir à la sécurité des baigneurs, de déboiser les petits sentiers qui couronnaient le lac du coté nord … 

Le lac était sous la responsabilité des municipalités limitrophes, un autre mot qui donna la permission à Clément de souligner les limites de mon vocabulaire ! Il me faut préciser que Clément accompagnait toujours ses remarques d’un rire profond que les cigarettes qu’il fumait à la queuleuleu finissaient par étouffer dans une toux sèche. 👀

N’allez pas croire que le président de la Coop était dénué de toute humanité ! Sous sa moustache amincie d'evzone grec et son teint basané , le Zorba du nord lançait des commentaires  joyeux ! Ses remarques piquantes nécessitait de ma part une attention soutenue parce que chacune était accompagnée d’une leçon de latin, de grec, d’histoire... 💥💥💥Le latin changea à jamais ma vision de ce lac : il était un trophée alloué aux municipalités qui le retrouvaient dans les limites de leur territoire ! Limitrophus ! 

Clément tenait des propos littéraires. Un jour alors qu’il m’avait mis au défi de composer un poème sur le lac Gobeil , il  m’instruisit sur Daniel Defoe, l’auteur de Robinson Crusoë qui disait-il était à la recherche d’un Paradis perdu. 🌊🌊Clément m’avait demandé de lui décrire une île. Son île. Le lac Gobeil. 

Ayant commis un poème qui fut affiché à l’entrée du petit pont qui menait à la plage, j’eus l’honneur de recevoir un congé d’une journée …Congé du lac, car Clément avait plus d’un tour dans son sac. Je fus promu assistant mesureur d’un jour.  🕔🕔🕔Toute une récompense : me lever à 5 heures du matin pour aller me faire manger par les mouches au nord de la 138 à la hauteur du Club de pêche Tadoussac où la coopérative faisait chantier ! 🌲🌲🌲

Ce fut pourtant une des plus importantes journées de l’été. D’abord, Clément ne conduisait pas une voiture, il conduisait une idée, l’idée que toutes les montagnes, toutes les rivières, toutes les épinettes étaient à nous. Nous, le peuple. Et je l’entendis citer, réciter même, Félix-Antoine Savard qui lui-même citait Louis Hémon. 📜📜📜

« Nous sommes venus il y a trois cents ans, et nous sommes restés... Ceux qui nous ont menés ici pourraient revenir parmi nous sans amertume et sans chagrin, car s'il est vrai que nous n'ayons guère appris, assurément nous n'avons rien oublié.

«Nous avions apporté d'outre-mer nos prières et nos chansons: elles sont toujours les mêmes. Nous avions apporté dans nos poitrines le coeur des hommes de notre pays, vaillant et vif, aussi prompt à la pitié qu'au rire, le coeur le plus humain de tous les coeurs humains: il n'a pas changé. Nous avons marqué un pan du continent nouveau, de Gaspé à Montréal, de Saint-Jean-d'Iberville à l'Ungava, en disant: Ici toutes les choses que nous avons apportées avec nous, notre culte, notre langue, nos vertus et jusqu'à nos faiblesses deviennent des choses sacrées, intangibles et qui devront demeurer jusqu'à la fin.

«Autour de nous des étrangers sont venus, qu'il nous plaît d'appeler des barbares; ils ont pris presque tout le pouvoir; ils ont acquis presque tout l'argent; mais au pays de Québec rien n'a changé. Rien ne changera, parce que nous sommes un témoignage. De nous-mêmes et de nos destinées nous n'avons compris clairement que ce devoir-là: persister... nous maintenir... Et nous nous sommes maintenus, peut-être afin que dans plusieurs siècles encore le monde se tourne vers nous et dise: Ces gens sont d'une race qui ne sait pas mourir... Nous sommes un témoignage.

«C'est pourquoi il faut rester dans la province où nos pères sont restés, et vivre comme ils ont vécu, pour obéir au commandement inexprimé qui s'est formé dans leurs coeurs, qui a passé dans les nôtres et que nous devrons transmettre à notre tour à de nombreux enfants: Au pays de Québec rien ne doit mourir et rien ne doit changer...» 



Le voyage fut de mots, comme si les épinettes, grand couvert noir sous le soleil, blanchissaient exprès pour accueillir les paroles de Clément. Et puis nous sommes arrivés à un chantier : des cordes de bois sur le bord d’une route gravelé, le bruit continu des moustiques, et un peu plus bas dans une coulée, monsieur Gilbert Gagné et son fils Sylvain sont à l'ouvrage . 

Il y en avait pour tous les sens: l’odeur d’huile brûlée de la "Timberjack" jaune, le treuil  prêt à tirer les arbres ébranchés que Sylvain venait d’enrouler avec un câble rude et rouille, lequel à son tour étranglerait le voyage de bois en longueur, mû pour ce faire par la force du cheval mécanique mené habilement par son père. 🌞🌞


Je suis étonné par la force de ces deux hommes, par leur lente ardeur au travail, lenteur de la prudence commandée par les risques du métier. Et puis le repas. J’ai presque honte de mon sandwiche au creton de ¼ de pouces 💭💭 quand je vois monsieur Gilbert mordre dans un sandwiche de pain de fesse où une tranche de baloney se fait aussi fournie que mon lunch au complet ! Quand j’en ferai la remarque à Clément, il me dira que c’est dur d’avoir un pays. 

Gilbert Gagné en 1975

Que le travail dont je n’ai vu qu’une mince partie, -(pas plus épaisse que mon lunch👦)- est dur mais plus important que tous les autres parce qu’il est à la base de tout le reste.  Clément a raison, il me manquait une dimension. Et voilà Tonton reparti. Cette fois j’ai droit à St-Exupéry.✈🐏🐏 Puisque ce pays est à nous, il faut après l’avoir apprivoisé en être responsable. À l’arbre  qu’on coupe, on doit donner une réponse et reboiser, on en revient à la sylviculture ! 

Quelle journée! Je ne me suis jamais couché de si bonne heure…💤💤💤 la tête pleine de ce pays qui était le mien.    

Sur ce projet au cœur du trophée lacustre que constituait le lac Gobeil, j’étais accompagné de Joris Gravel, Réjean Caron et Sonia Ross.  

Quel été. Merci Coopérative. 


Quand Clément Gagnon pense 50 ans en avance ! -1980

 

Clément Gagnon vers 1976

Photo: Pierre Rambaud



Progrès-Dimanche , 6 avril 1980
REMARQUE:   Les lecteurs comprendront qu'il faut lire  Haute Côte-Nord plutôt que Basse. 










samedi 24 avril 2021

Les Dufour : de l'eau salée dans les veines.

 

Le Samuel-Cédric, du nom de ses petits-fils, a demandé 8000 heures
de travail avant d'être mis à l'eau en 1987.

Quand on pense aux Dufour, on pense à la mer. La navigation les passionne. J'ai deux beaux souvenirs reliés à Jean-Louis. 

1. Il fut président du festival de la BB en 1990, ce fut une belle édition. Le capitaine Dufour fit profiter de son savoir à tous les festivaliers; les thèmes reliés à la navigation prirent une place étonnante. Par ailleurs, monsieur Dufour prononça une courte  conférence pendant laquelle il fit part de faits marquants liés à l'apport de la navigation à la vie du village. Selon le capitaine Jos Dufour , son père, Jean-Charles  à Barnabé, mon aïeul,  sacrait beaucoup , ce qui à cette époque était très mal vu sur un navire. Il passa donc d'homme de pont à homme de quai. J'ai comme mon ancêtre  toujours aimé sacrer, juste pour faire mentir la fallacieuse observation populaire selon laquelle blasphémer témoigne d'un vocabulaire pauvre ; c'est tout le contraire, le sacre est un trésor de déclinaisons qui berce mon impatience ! La parole du Lévitique  dit  « qui blasphème le nom de Dieu devra mourir » (24-16); Ernest Renan , philosophe, un contemporain de Darwin,  disait que « le blasphème  est plus agréable à Dieu que la prière intéressée de l’homme vulgaire ». Me voilà réhabilité ! ;)

2. À un autre moment, que je situerai aux alentours de 1985, Jean-Louis Dufour m'avait fait observer qu'il n'y avait pas de place au village pour une véritable quincaillerie. Un service de quincaillerie de dépannage me disait-il était tout à fait adéquat. Comme j'en étais à mes premières armes dans ce domaine chez GLR , je lui avais non seulement donner mon approbation à ce sujet mais je lui avais fait remarquer que Tadoussac verrait aussi disparaître  ce service au sein du village. Le potentiel dans ce domaine était aux Escoumins et à Sacré-Coeur.  Monsieur Dufour, de par quelques expériences passées, avait sur le développement économique local un  regard froid.   Un capitaine finit par voir dans la brume ! :)

 Progrès Dimanche , 23 mai 1993.













Jean-Louis Dufour  à Joseph et à Gilberte Bouchard est décédé à Bergeronnes le 7 mai 2019 .


Au sujet de Jos Dufour, à lire sur ce blog (cliquez pour y être dirigé)






Le Parc- Nature : un élan positif -Août 1979

Progrès Dimanche , 12 Août 1979










Les Bergeronnais veulent travailler sur le chantier de la nouvelle 138 . -1985


 De tout temps, il aura été pour les travailleurs des régions parfois fort difficile d'avoir accès aux projets nationaux  qui  avaient lieu dans leur cour arrière. Ce fut le cas en 1985 lors de la relocalisation de la route 138 dans le village. Les années 80 furent difficile pour les travailleurs de la construction, l'effet de la récession, la fermeture des moulins locaux, la piètre performance de la mise en chantier domiciliaire les avaient atteint de plein fouet ... Pourquoi s'exiler encore quand du travail était offert près de la maison ? Je me souviens d'une lettre touchante signée par Lydie Bouchard (à Paul) alors jeune mère de famille,  qui en avait ras le bol de voir s'exiler année après années son conjoint, le père de ses enfants, Nelson Michaud (à Montclam) . De mémoire, ses arguments voulaient démontrer que  vivre dans ce village  était un choix qui devait être encouragé et soutenu par les gens du milieu. Avec raison , les ouvriers réclamaient de pouvoir vivre d'un chantier qui était dans leur cour arrière, dans leur localité. 




Le camping Bon-Désir devient le Parc-Nature Bon-Désir -1979

 

Progrès du Dimanche , le 1er juillet 1979


En 1979, j'ai la chance de travailler au Parc-nature Bon-Désir  à titre d'étudiant (du village) . Je suis accompagné dans mes tâches fort diversifiées de Mario Gagnon (du Canton) à Ovide. Le Parc Bon-Désir est présenté sous le vocable de Parc-Nature , une idée nouvelle pour une équipe nouvelle. L'objectif est d'allier les forces du site : le camping et la diversité des attraits naturels: eau, terre, air, mer...  Ce nouvel élan sera  freiné par un été sec qui videra complètement le puit du camping. Ce qui obligera l'équipe de travailleurs à ravitailler le camping en transportant de l'eau du village au terrain de camping à l'aide de baril. Le maire de l'époque, Robert Larouche,  fera tout son possible pour trouver une solution temporaire. Le réseau d'aqueduc du village est éloigné et il n'y a guère qu'une solution qui s'impose: approvisionner le site en se collectant au réseau  municipal. Une idée qui fera son chemin... lentement. Chose certaine après cette expérience et un rapport étoffé rédigé principalement par Pierre Rambaud, le parc  ne sera plus jamais négligé, il sera désormais au centre du développement touristique des deux Bergeronnes.