Slam: Du pays
Ne me parlez plus des mines de la Côte-Nord
De son vent tiède de juillet
De ses plages froides décalifornisées
De sa mer de Champlain
De ses paysages rêches
Ne me parlez plus de la terre de Caïn
Ne me dites plus jamais qu’on se développera.
Nous sommes les exploités des exploités
Nous sommes en 1960 en 2000
Nous sommes en perdition
En constante désillusion
Lâchez-moi avec votre camp dans le bois
votre chalet au bord du lac
vos expéditions naïves
les orignaux que vous abattez
Ce n’est qu’illusion
Et tribut du pauvre
Regardez plutôt les fils,
Nos eaux harnachées ,
Qui éclairent Montréal
Qui réchauffent Québec
Qui fuient avec les sueurs de nos pères
Qui passent au–dessus de nos têtes
Nous n’existons nulle part
Nous ne sommes que plans de redressement
Rapports tablettés
Hôtes pour les soirs d’élection
dJob de passage : fly in- fly out !
Parlez-moi des CLSC sans m.d.
Des patients qui se vident de leur vie
Des usines qui se démantèlent
Des villages qui se meurent
Des dépanneurs qui vivotent
De notre droit à la culture
De ce que nous ne savons pas lire
De ce que nous ne pouvons pas faire
De ce que les jeunes pensent d’eux-mêmes
Du trou que nous avons laissé creuser au centre de leur cœur
Ne me parlez plus en mal de ce pays qu’ont habité les miens
De Julien à Barnabé exploités par la Hudson Bay,
De Barnabé à Jean-Charles
Exploités par les Price
De Jean-Charles à Ovila
Exploités par la Consolitaded Barthurts
De Madeleine à Robert
Exploités par l’Anglo Canadian Pulp
De Robert à Coralie
Exploités par la Kruger
Ne me parlez plus de ce pays
Dans le pays
Laissez-moi crever de souvenirs
De nostalgies
De rêves inassouvis
Laissez-moi au moins ça!
Laissez-moi avant que ne se ferme l’œil
De l’homme fatigué
Voir s’écrouler les rêves de René Lévesque
Sous le poids de la nonchalance
De notre négligence
De notre silence
Nous n’aurons bientôt plus rien
Rien que des patchs subventionnés
Sur nos plaies
Laissez-moi me cacher , loin
Comme le font nos chiens malades
Pour me soustraire aux regards compatissants
Des politiciens
Des poètes
Des opportunistes
Laissez tomber Jos Monferrand
Gommez Jack Monoloy de vos mémoires
Et ouvrez l’œil comme on a ouvert vos rivières
Et videz vous le coeur comme on a vidé vos forêts
Et criez votre rancœur
Car mon pays ,ce n’est pas mon pays /
Ce fut trop de fois celui des autres !