Instant de vie chez les Bouchard

Instant de vie chez les Bouchard
Claude Mattheau, 2014

jeudi 29 décembre 2022

Treize - ou L'art de bien débuter une année.



Il tenait dans sa main des ciseaux qu'il venait de saisir dans son étui à crayons.  
 
Cette histoire m'est revenue à la mémoire  le 29 décembre 2022 en lisant La Presse . 


Le chroniqueur Patrick Lagacé raconte l'histoire d'un prof du secondaire du Quartier Saint-Michel qui a été poignardé . La chronique s'intitule : Souviens-toi que tu vas mourir . Grosso modo , ce prof a reçu un coup de couteau qui  failli lui sectionner une artère, la pointe de l'arme blanche lui a effleuré le coeur. Il aurait pu mourir .
 
Mon histoire est différente , le prof de Saint-Michel   a été attaqué de dos , moi, de face. 


Le directeur de l'établissement, monsieur  Paradis, un nom prédestiné, m'avait confié un groupe d'élèves dits turbulents. Ils étaient treize. Tous des gars. Je me souviens d'eux.  Ils devaient avoir 13 ans . Ou à-peu-près. Je n'ai jamais vérifié. Ils étaient entrés dans ma vie comme tous les autres élèves,  par la porte du local A-S-35 . 
 
Disons pour simplifier que la caractéristique commune qui aurait pu les définir était le mot perturbation. Définition officielle: agitation dans la vie sociale ou individuelle. Qu'était-il arrivé de si exceptionnel pour que ces gars-là détestent l'école et ses règles  ? Je ne l'ai jamais su. Je ne voulais pas vraiment le savoir. De toute manière,  j'avais déjà décidé qu'ils seraient mes meilleurs.
 
Mes meilleurs. Personne autour de moi n'aurait misé sur ces treize flos. En tout cas, le jour de la distribution des tâches.  personne ne s'est offert pour les prendre sous leur aile. Ça sifflotait en regardant le sol , mes collègues! Mais puisque j'avais débuté ma carrière en inaugurant les groupes préparatoire au DEP , composés de potentiels décrocheurs qui avaient accumulé trop  d'échecs pour sourire à l'avenir  et que j'y avais eu un succès fou, oui, fou est le mot, j'ai hérité des treize.
Voilà pour la mise en contexte. 
 
Il advint ce qui devait advenir, ils furent mes meilleurs. Pas au niveau académique, non. Pas au niveau disciplinaire, non. Pas ce genre de meilleurs . Ils devinrent le meilleur groupe en visite dans le local A-S-35 .  Le mot visiteur fut celui qui remplaça le mot  perturbateur. 


Disons qu'en octobre, un mois après la rentrée sans avoir réglé le tiers de la moitié du quart des problèmes de chacun, on avait quand même fait pas mal de français. Plus qu'il n'en avait jamais fait dans toute leur vie. Leur spécialité jusque là , avait été surtout d'empêcher les autres d'apprendre. Et tout à coup, ils avaient  dans ce groupe restreint, un enseignant qui leur demandait : " Aujourd'hui, on travaille ou on ne fait rien ? "   Ils choisissaient d'un accord tacite de ne rien faire. Et je faisais comme eux, rien. En fait, sans en avoir l'air, je réfléchissais . 
 
Au bout de quelques cours , le vent a tourné.  L'un d'eux , il s'appelait JF , m'a  demandé : Qu'est-ce qu'on fait aujourd'hui ? 
Je lui ai répondu le plus sérieusement du monde : De la chimie. 
Il m'a dit, et ce fut l'étincelle qui transforma ce groupe: Robert, arrête de niaiser . 
 
Je venais de renverser la vapeur et le problème n'était plus de savoir qui ne travaillait pas dans cette classe, le coupable était identifié,  c'était moi ! Je profitai de cet instant de grâce pour leur dévoiler le fruit de mon temps perdu à réfléchir. 
 
Ce fruit : un simple carton. Je leur ai dit de se débarrasser de leur agenda où étaient présentés les 15 règlements de la polyvalente. Nous n'avions besoin que d'avoir des droits.
 









Je leur ai même demandé s'ils voulaient ajouter un quatrième droit. Bobby, le plus costaud , a répondu qu'il n'y avait plus de place sur le carton .  Esprits pratiques, ils ont acquiescé.
 
La cohésion du groupe se jouait sur des privilèges simplistes. Prendre une pause à la 37 e minutes du cours à condition que Julien , par exemple, ait terminé de corriger le premier paragraphe de son texte explicatif. La pression mise sur un seul individu était non seulement efficace mais pour obtenir leur récompense, ils se sont mis à s'entraider ! Puis, sans privilège aucun,  cette entraide devint coutumière. Pavlov avait raison.
 
D'ailleurs quand je leur ai raconté l'histoire du chien de Pavlov, je fus surpris par une question biaisée : Est-ce que tu nous traites comme des chiens ?   À une question dont la réponse risque d'être ambigüe , on répond par une question : Comment sont traités vos chiens à la maison ?  Le débat fut clos .
 
Le paradis ? Non, mais un groupe qui partageait enfin le goût du travail.
 Puis est arrivé ce jour, où un élément en a eu marre du groupe.
 S . (préservons ici, son identité) , s'est mis à rechigner.
 
C'est de la marde, l'école. Qu'est-ce que ça donne de travailler pour rien. Vous êtes tous une gang de cons.
 
Chacun des arguments de S.  fut contesté par les autres élèves. Construire un texte explicatif, ça laisse des traces dans le cerveau !
 
Exaspéré que je ne sois pas le titulaire de la discipline dans ce groupe , S. s'est levé avec un ciseau dans la main et m'a dit : "Je vais te percer! "
 
Ayant le droit de parole et le droit de me tromper, et profitant des 36 pouces du pupitre qui me séparaient de sa menace , j'ai relevé mon chandail à la hauteur de ma poitrine et j'ai déclaré comme je l'aurais fait dans une comédie de situation: J'espère que tu as du visou parce qu'il va falloir que je me défende.
 
Il a finalement usé de son droit de parole en ramassant ses affaires : Moi, je crisse mon camp chez nous!
 
 J'ai refusé de porter plainte. J'ai signalé l'incident à monsieur Paradis.
 
S. n'est jamais revenu dans ma classe ni à l'école . Ce fut la seule défaite de ce groupe de treize.
 
Ce n'était pas la première fois de ma vie que je vivais une agression: j'ai déjà reçu des menaces comme beaucoup de monde, une bouteille de bière par la tête comme pas trop de monde, un tas de bêtises comme ça se fait dans le monde et des silences hostiles de la part du monde... 
 
 À chaque fois, j'ai ressenti le même désarroi . Une même question revient dans cette confusion qui trouble l'existence: Quel désordre intérieur pousse un humain à user de moyens si drastiques pour se faire entendre ? 
 
 Je n'ai pas cette réponse.
 
Si cette réponse ,  l'élève S. l'avait eue, au lieu de trois droits, la classe en aurait eu quatre. 


jeudi 8 décembre 2022

Architecture de l'église de Bergeronnes

 


Texte de vulgarisation 

Les plans de l'église de Bergeronnes ont été conçus par l'architecte Joseph-Pierre Ouellet (1871-1959). Il vaut la peine de regarder de plus près le travail effectué en 1903 et 1904 pour bien en saisir toutes les caractéristiques . 

    L’église actuelle a été érigée de 1914 à 1916 selon les plans de l’architecte  par les entrepreneurs Joseph-Hubert Morin et Joseph Saint-Hilaire au coût de 28 000 $. Elle est construite entièrement en bois et a été quelque peu  modifiée à l'intérieur depuis son érection. 

    Quelques changements 

    En 1949, on procède à la construction de la tribune arrière. En 1974 , l'église devient un centre communautaire. Des portes sont déplacés, les bancs enlevés et remplacés par des chaises. Du tapis recouvre désormais les allées de droite et de gauche.  


LA FIN D'UNE ÉPOQUE 

Il est mentionné dans le livre intitulé La fin d'une époque: Pierre-Joseph Ouellet , architecte que ce dernier est influencé par des courants américains et européens. Retenons d'abord que le faste hérité des ouvrages européen et le caractère monumental des constructions américaines  influencent toute l'architecture du début des années 1900. Les milieux où oeuvre l'architecte  Ouellet sont souvent très conservateurs et ne sont pas en phase avec la révolution industrielle qui tend à prioriser l'utilisation de l'acier et du béton pour ériger de nouvelles constructions. 



Aux Bergeronnes et à Sacré-Coeur, Pierre Ouellet , originaire de Saint-Fidèle , sera tenté par des innovations structurales. Même s'il privilégie une élévation de façade très classique , il accentue la tour centrale qui se dégage au dessus du pignon , par des fenêtres allongées . En 1904 ,il tente le coup à Ste-Méthode et reprend ce plan en 1912 à Bergeronnes. Cette reprise n'est pas une copie de sa propre oeuvre mais bien un avancement vers un style plus prononcé. 


Église de Sainte-Méthode (1903)

Le clocher est de type fronton complet  L'entablement à la hauteur du triangle de la toiture  supporte le clocher . Ce type de clocher est présent tant à Sacré-Coeur qu'à Bergeronnes.



Encore une fois, il s'agit d'allonger les lignes verticales. La flèche  de forme pyramidale accentue cette élévation .


Sacré-Coeur ,1908

Le plan de base de Saint-Méthode est refait pour Bergeronnes. J'ai pris la liberté d'en spécifier les principales composantes . 



À gauche plan original , à droite plan modifié par l'auteur pour fin de comparaison 

« Le chevet, composé d’un choeur de deux travées et d’une abside à trois pans égaux est greffé à un édifice rectangulaire de forme allongée. La tour unique fait une avancée en façade et le chœur est pourvu de deux sorties qui donnent accès à la sacristie. Pour assurer ce passage direct, Joseph-Pierre Ouellet utilise les deux espaces en forme de triangle libérés par les pans inclinés. Ces réduits donnent accès à la sacristie construite dans le prolongement du chœur. À Pointe-au-Pic, en 1917, il utilise le même procédé, cette fois sans édifier une sacristie à l’extérieur. »

 -Luc Noppen , architecte et historien de l'art in Noppen, Luc, Claude Thibault, Pierre Filteau. La fin d’une époque. Joseph-Pierre Ouellet architecte. Québec, Ministère des Affaires culturelles, 1973. 139 p.
 



On remarque que vu de l'arrière l'église de Bergeronnes se termine par un chevet qui se décline en trois pans  , ce qui n'est pas le cas de Sainte-Méthode . Le déambulatoire de l'église Notre-Dame de Bon-Désir compose toute la partie arrière (chevet) . Le hall est percé seulement au centre . Les portes menant du choeur au déambulatoire  qui n'existent plus aujourd'hui, sont placées en angle par rapport au rond-point plutôt que sur la ligne du mur latéral .  La voûte se poursuit jusqu’au niveau du chœur adoptant cette fois la forme d’un demi-cercle, surmontée d’une colombe au-dessus de l’autel central. 

1954 , Carpentier (BANQ)

Les portes menant au déambulatoire et de là, à la sacristie étaient toujours en place en 1954. Les bas-côtés reprennent des éléments de l’élévation centrale.




Le plan de Bergeronnes comporte quelques particularités , mais est très ressemblant à celui de Sacré-Coeur. On peut parler sur le strict plan architectural, d'églises jumelles. 





On rapporte également dans cette étude du travail de Ouellet, le fait que l'église de Bergeronnes a échappé à une organisation complexe de l'espace qui avait cours à la fin du XIX e siécle et qui préconisait de  répéter les ornementations dans toutes les structures.


ibid p. 58


L'architecte Ouellet choisit d'épurer ses plans. L'église Notre-Dame de Bon-Désir est tributaire de ce changement. On retrouve donc  une nef centrale aux travées symétriques et l'entablement est épaissi. La nef centrale ne s'intègre pas au choeur. On peut voir sur la photographie ci-bas,  l'asymétrie des travées qui s'élèvent au dessus du choeur , toutefois les  trois pans qui protègent le déambulatoire sont associés à trois pans verticaux qui séparent de façon symétrique la niche semi-circulaire (abside) . 

Patrimoine culturel du Québec 
La voûte se poursuit jusqu’au niveau du chœur adoptant cette fois la forme d’un demi-cercle, surmontée d’une colombe au-dessus de l’autel central.



La tribune à deux paliers sert dans certaines églises à dissimuler la sacristie (appelé sacristie basse) qui se retrouve alors au sol et est reliée par un escalier au choeur. L'église de Bergeronnes échappe à cette tendance grâce à une coupe qui permet de placer au même niveau les deux espaces. Le déplacement  des portes situées aux  pans arrières a eu comme conséquence d'annuler cet avantage. Un escalier relie maintenant ,contre toute logique architecturale , la sacristie au premier niveau de la tribune. Toutefois la rotonde , qui en fait n'est qu'un lieu-dit ,puisque l'église Notre-Dame de Bon-Désir  n'en présente pas véritablement les caractéristiques , profite de cette double tribune qui a dégagé le chevet et créé un espace convivial qui a beaucoup évolué selon les besoins religieux et profanes des communautés limitrophes.

Il est à noter que seule l'église de Pointe-au-Pic (construite en 1917 et révisée en 1936 par Ouellet)  a conservé toute son intégrité architecturale.  Serge Gauthier, historien émérite, rapporte que cette église pourrait vraisemblablement devenir un musée témoignant de l'immense oeuvre architecturale de Ouellet  qui est originaire de Charlevoix.

Photo Pierre Rochette, Charlevoix d'est en ouest


Chevet 
(photo : Patrimoine culturel du Québec)

mercredi 7 décembre 2022

Un homme marche .

 


Un homme marche. Le dernier. Les autres sont disparus. Il s’est levé et a pu se rendre compte qu’il était seul. La banque n’est pas ouverte, la lumière verte à l’intérieur est éteinte. Le centre des loisirs est désert.  L’église n’a plus de portes. Pour y entrer, il faudrait qu’il grimpe sur la toiture et qu’il marche sur l’arête jusqu’au clocher.

Impossible!

Un homme marche. Ses pas le mèneront à l’épicerie. C’est ouvert. Le caissier lui explique que rien ne lui sert de courir là ou encore là. Puisque plus rien ne bouge, il a tout son temps ! 

Un autre client, un vieillard aux lunettes en  corne noire , lui raconte que tout n’est pas disparu du jour au lendemain. Un dimanche, il y avait une personne ou deux de moins au temple. Une autre fois, ce fut quatre.  C’était presque imperceptible mais lui, le vieux, il avait eu tout son temps pour observer et faire le compte.

Il constata le même phénomène au centre civique. Et à la banque, on se réjouissait de ne plus avoir à faire la file. « Bientôt, dit-il, je savais que je pourrais avoir l’aréna pour moi seul. Mais, on ferma la glace du centre avant que ce jour n’arrive. »

Ce que le vieux trouvait bizarre, c’est que parfois ,des citoyens se plaignaient de ne pouvoir utiliser tous ces services quand bon leur semblait. Une ou deux fois par année, un souffle de colère traversait le village , mais ça ne durait pas, même la colère n'arrivait pas à survivre dans le village.

Un homme marche. Le dernier. Les autres ont disparus avalés par la colère qui fut elle-même avalée par l'apathie.

L’homme qui marche se dit qu’un jour, un autre marchera avec lui, et qu’à ce moment-là, ils pourront ensemble, voir ce qu’il y aurait à faire de nouveau avec toutes ces portes barrées et ces lumières éteintes .

Deux hommes marchent. Le vieillard aux lunettes aux montures de corne a décidé qu'il pouvait marcher encore un peu. 

Et leurs pas faits ensemble furent le début de l’avenir.

 

 


 

mardi 6 décembre 2022

Pierre Dumont (1936-2022) , journaliste puis imprimeur.

Le Soleil, 28 mars 1995
<

 Je me souviens avoir visité cette imprimerie en compagnie de mesdames Geneviève Larouche et Gianna Bella, de Christian Girard et Alain Lacasse .Monsieur Pierre Dumont nous avait reçu avec amabilité et nous avait expliqué le fonctionnement des appareils offset , ce qui en 1980 , était le summum en terme de qualité d'impression. Ce jour-là , les presses accueillait un numéro du magazine Québec-Science. 

Pierre Dumont était le fils de Barthélémy Dumont (Ferdinand) et Maria Desbiens (Thomas) . 






dimanche 27 novembre 2022

Les Girard- hommes-forts

1889- 1978     Décès à 89 ans.




 

Les sources de l'Hymne à Notre-Dame de Bon-Désir

          
Simon Gagnon en 1944 
Tirée du film:  Centenaire de Bergeronnes

L'Hymne à Notre-Dame de Bon-Désir  a été inspiré par  un Cantique écrit par Paul-Émille Lavallée.  La musique de ce chant religieux intitulé Cantique à Notre-Dame de Blanche est l'oeuvre du Père Émery Verville O.M.I .

Les paroles écrites par Simon Gagnon sont fortement inspirées par le texte d'origine. Le texte est  parfois paraphrasé  quand il n' est pas  pas tout simplement répété. Fait étonnant, nulle part n'est mentionné la source du texte original. Bien qu'il soit coutumier  de s'inspirer d'une chanson en adaptant les paroles à un nouveau contexte, omettre de  mentionner les sources correctement est une maladresse qu'il faut corriger. Mais encore faut-il le savoir.

Par exemple, lors des Semaine du Patrimoine en 1977, la chanson Rame, Rame de Tex Lecor est revue pour servir d'hymne patrimonial  aux Bergeronnais. 


Rame, rame, rame donc

Le tour du monde, le tour du monde   devient  Le patrimoine, Le Patrimoine....

Rame, rame, rame donc
Le tour du monde nous ferons.    devient  Le Patrimoine nous fêtons.    

Dans ce  cas, les paroles sont transformées et  les sources sont mentionnées.




TEXTES COMPARÉS  



Il est évident que certaines parties du texte sont reprises intégralement. 


Des références à préciser

Lors des publications du texte de l'Hymne à Notre-Dame de Bon-Désir, il est souvent mentionné que Paul Émille Lavallée  est  le compositeur de la musique . Un article publié après le décès du père Verville permet de préciser les choses: l'auteur est Paul-Émille Lavallée  et le compositeur est le Père Émery Verville. 




Notice biographique sur Paul-Émile Lavallée dans Les Anciens
du Séminaire
, écrivains et artistes,  Joliette, 1927, p. 203-206.








Il est mentionné dans le boîtier édité lors du centenaire de l'église par  la Chorale Gens du pays  que la  musique est l'oeuvre du Père Verville. Ce qui est juste. 

Toutefois, certaines publications antérieures prétendent à tort que le Père Lavallée est le compositeur. Idéalement, les deux noms devraient  être mentionnés à chaque fois que sont publiées les sources de l'oeuvre puisque les deux religieux en sont les artisans. Un article tiré du journal Le Droit établit clairement la part de chaque intervenant .  



























ÉTUDE COMPARATIVE ET INTERCULTURELLE DES DEUX ŒUVRES LITTÉRAIRES FRANCOPHONES, 
  • Juillet 2017, Tania Intan, Université de 
  • Padjadjaran Bandung, West Java, Indonesia


    Les hymnes à Notre-Dame sont nombreux ,  tout comme sont nombreuses, les paroisses catholiques à travers le monde qui consacrent à la Vierge Marie une dévotion spéciale. Une hymnologie  qui permettrait d'en faire la comparaison nous permettrait de découvrir la communauté d'idées qui existe entre les chants dédiés à un Saint patron.

     







    Mêmes thèmes :  réalités différentes

    Enfin, les plus curieux d'entre vous auront remarqué que le premier couplet de Simon Gagnon décrit une réalité géographique qui rompt avec le texte original . Le  cantique Notre-Dame de la Blanche  s'attache dans ses références géographiques  à la région de Lanaudière.




    Les croisements entre les deux textes sont pour la plupart thématiques. Ainsi les deux textes évoquent le travail, la nature, le domaine religieux et la mort . Il est évident que l'hymne bergeronnais est un chant qui traîne quelques  accents patriotiques  tandis qu'avec les mêmes thèmes, Lavallée fonde une oeuvre  mystique destinée aux Oblats.  


    L'hymnodie consacrée à la figure de Notre-Dame est aussi vaste que les nombreuses dénominations liées à la figure de la Vierge . Les nombreuses déclinaisons en matière de chants ne devraient donc pas nous surprendre.

    existent plus de parallélismes que
    des contrastes. Cela donc atteste que les
    auteurs francophones, malgré leurs
    différences (géographique, culturel,
    historique), ont des ressemblances dans leurs
    œuvres, notamment sur les thèmes classiques
    à évoquer (discrimination, indépendance,
    nature,…)
    existent plus de parallélismes que
    des contrastes. Cela donc atteste que les
    auteurs francophones, malgré leurs
    différences (géographique, culturel,
    historique), ont des ressemblances dans leurs
    œuvres, notamment sur les thèmes classiques
    à évoquer (discrimination, indépendance,
    nature,…)

    samedi 26 novembre 2022

    La mort du chien- Récit de Noël

       

    Nous étions au moins une dizaine de garçons du village à aimer ce chien. Nous l'appelions affectueusement Dog pour que la liste des mots anglais affichée dans la classe de l'école de briques rouges serve à quelque chose.

    L'été , il arrivait souvent que le chien nous suive dans nos jeux et aussitôt avait-il  compris que sa maison commençait à être un peu trop loin, qu'il faisait le chemin à l'envers. On essayait bien de la garder avec nous en lui lançant notre unique  balle de baseball ... Mais non, Dog avait atteint le bout de sa corde imaginaire. On ramassait notre balle pleine de bave et admirions la légendaire fidélité  qui le faisait retourner chez lui. Aucune inquiétude,  il ne  pouvait se perdre, c'est connu, les chiens plantent des poteaux de signalisations partout où ils passent ! 

    *

    L'hiver,  à chaque fois que nous marchions en bande pour nous rendre à l'école , il nous saluait de sa plus forte voix. Il suffisait qu'on l'approche pour qu'il manifeste une joie silencieuse. Tous, nous avions le même réflexe, on enlevait nos mitaines de laine et on laissait glisser nos petites mains  dans la chaleur humide des poils du chien. 

    Comme il était heureux ce chien. Pas un de nous ne se demandait ce que pouvait faire Dog de sa journée. On l'enterrait sous nos caresses en passant et cela nous suffisait. Une autre chose connue, c'est que les enfants vivent au présent. Ce sont les adultes qui les tirent vers l'avenir, sinon, les enfants passeraient le reste de leur vie dans un utérus ! 

    Si le chien avait pu parler, il n' aurait pas pu nous dire que le pire était à venir. Ce genre de  niaiseries-là,   on entendait ça à la messe. Il n'aurait pas non plus fait de longs discours sur  l'importance des leçons et des devoirs. Non ! le chien aurait juste ancré ses mots dans le présent. Mais, il ne parlait pas notre langue.

    Par contre, il m'est souvent arrivé de lire dans les grands yeux noirs du chien , un message important: Reste ici avec moi, on va bien s'amuser. Mais je ne restais jamais. Il me fallait comme tous mes copains entrer dans la grande école de briques rouges pour  préparer mon avenir en découvrant des sciences venues du passé ! 

    C'est bien beau, la religion, les tables de multiplication et les règles du participe passé ,  mais ça ne suffit pas à  neutraliser  la tête d'un enfant. À 10 ans, ce qui m'intéressait vraiment, c'était le monde étrange de Dog. 

    J'en avais appris un peu. Le chien à l'heure des repas regardait sa maîtresse oeuvrer à la cuisine. Il salivait. Le midi , devinant le bruit des voix libérées des écoliers, il demandait la porte. Il  jubilait.  En soirée,  au pied de son maître qui lisait Le Soleil , il sommeillait. 

    Dog était heureux. Il partageait son bonheur tranquille avec nous, les enfants du roc. 

    **

    Le présent, même celui d'un chien, peut être bouleversé. Il aura suffi d'une seconde, une toute petite seconde, pour que l'univers du chien  bascule. 

    Il devait être huit heures.  Dog n'avait pas aboyé et ne s'était pas dirigé avec toute sa fougue vers la bande d'écoliers pour qu'on puisse laisser courir nos mains sur ses flancs et faire s'ébouriffer  son poils dru.  Rien. Il a bien fallu que les écoliers se rendent à l'école. 

    Et c'est là que nous avons appris la nouvelle. Monsieur Victorien, le concierge de l'école de briques rouges,  nous avait appris que le chien avait été heurté par l'autobus Drolet . Pendant la matinée, il avait dû interrompre son travail des dizaines de fois, la source du savoir n'était plus dans les livres, c'était monsieur Victorien qui la portait ! 

    Le même monsieur Victorien qui se déguiserait en Père Noël la semaine suivante pour nous souhaiter de bonnes vacances, était, une semaine à l'avance, la coqueluche du jour.  Pour une fois, même ceux qui n'aimaient pas apprendre, furent soudainement pris du vertige que procure la curiosité. Si les profs avaient eu le droit de sortir du maudit programme, les élèves  auraient composé en ce jour triste, une ode collective à Dog...

    ***

    Toute ma nuit, avait été un écran noir où le chien se faisait écrabouiller par un autobus malvenu. L'autobus qui glisse. Le sang sur la chaussée glacée. Les poils hérissés. La bête qui se traîne pour retourner dans les bras chauds de sa maison. Ai-je dormi ? Toutes ces images étaient si réelles...

    Je tenais  au bout de mes doigts devenus inutiles, une cuillère que j'hésitais à tremper dans le bol de  cornflakes devenus trop mous . Ma mère devinant le tourment qui me hantait me dit  que je pouvais aller voir. 

    -C'est pas comme si tu les connaissais pas, tu y es déjà allé avec ton père. 

    C'est  extraordinaire comment en une phrase, une mère  peut vous donner le courage nécessaire pour affronter la vie . 

    Le chien était enroulé dans une couverture et il tremblait de tous ses membres. Monsieur Beaupré avait  déposé une carabine sur la table de la cuisine. Il y avait aussi une boîte de balles verte et jaune.  Madame Beaupré a vu les larmes qui coulaient sur mes joues. 

    -Il faut le faire. Il souffre trop. 

    Monsieur Beaupré n'a rien dit. La dame a pris ma main et nous nous sommes accroupis devant le chien . Je l'ai flatté. Doucement. Le chien a salué cette dernière caresse en agitant la queue. Malgré la douleur . 

    Dans ses yeux noirs, je voyais bien ce que Dog disait . Il faut que je me lève, que j'aille voir tes copains qui vont partir pour l'école. Que je revienne voir si ma maîtresse prépare le repas. Que je regarde mon maître lire le journal. Il le faut. Je dois être là .

    J'avais le souffle coupé . Je lui ai dit en le regardant dans les yeux : Tu ne seras plus jamais  là. Regarde le tapis qui accueille la neige quand tu te secoues , tu ne le verras plus. Regarde ces murs où se jette le soleil du matin . Regarde mes mains .  Je dirai à tous mes amis que tu es un chien courageux. Dog...

    J'ai essuyé mes yeux avec le revers de mes pouces. Et je suis parti sans saluer les Beaupré. Mes mots polis étaient étranglés par la peine. 

    ****

    Vers midi , en revenant de l'école, nous  avons vu  le couple  Beaupré descendre de leur voiture. La dame serrait une couverture  contre sa poitrine . Monsieur Beaupré  ouvrit le coffre arrière de sa Chevrolet. Il y prit l' arme à feu et entra derrière son épouse , les yeux au sol.  Nous nous sommes tous regardés en silence. On savait que ce qu'ils avaient fait était ce qu'il fallait faire.  

     Et en ce Noël de 1971,  cette peine commune de notre enfance,  fut sans doute le plus beau cadeau qu' on pouvait partager. Nous étions au moins un dizaine de garçons du village à  continuer à aimer ce chien.


    Mise en contexte 

    Au début des années 70 , les animaux domestiques ne recevaient que rarement des soins vétérinaires. L'euthanasie n'était pas chose courante. Entendre dire qu'un homme avait noyé des chatons parce que ces derniers n'avaient pas trouvé preneur faisait partie des moeurs. Rencontrer un chien qui déambulait librement dans une rue ou un sentier n'avait rien de surprenant. Les chiens mangeait les restes de table et non pas une nourriture fabriquée en usine spécialement pour eux.

    vendredi 18 novembre 2022

    La rentrée de septembre 1937 à Grandes-Bergeronnes



             
    Couvent de Bergeronnes, 1946 
    En 1935, il était le principal lieu d'éducation du village




     






    C'est en 1936 que cet établissement devient une École normale .


    Séminaire de Chicoutimi


    Le 15 août 1873, l'archevêque de Québec, Mgr Taschereau procède à l'érection canonique d'une nouvelle institution, le Séminaire de Chicoutimi, que vient de fonder, à sa demande, l'abbé Dominique Racine. Cette institution a pour but d'assurer un enseignement adéquat à la jeunesse masculine de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean et poursuit un but vocationnel en recrutant des candidats aptes à assumer les responsabilités sacerdotales. En 1877, le Séminaire est affilié à l'Université Laval pour ses programmes d'études. De plus, il a initié des activités journalistiques, musicales, scientifiques, syndicales et agricoles. Il a conduit à maturité, entre autres, la corporation du Grand Séminaire, la fondation de la Société historique du Saguenay et l'École d'agriculture de Chicoutimi. (Source: Abbé Clément Jacques Simard, conservateur des archives du Séminaire.).




    Maison d'enseignement privé fondée par les frères Oblats de Marie-Immaculée, en 1926. De 1926 à 1967, le séminaire a dispensé son savoir à plus de 3000 élèves de partout au Québec.
    Rappelons que du côté des francophones, à cette époque, très peu de gens avaient accès à l'enseignement qui était surtout réservé à la classe aisée ou à ceux qui se dirigeaient vers la prêtrise. Avec la Révolution tranquille et la distanciation des Québécois envers la religion, l'école ferma ses portes en 1967.