Instant de vie chez les Bouchard

Instant de vie chez les Bouchard
Claude Mattheau, 2014

lundi 26 septembre 2016

L'INVENTAIRE





Photo :Michel Clément 

Me voilà cette semaine pris entre deux Fêtes nationales. Et bizarrement, ni l’une ni l’autre ne m’inspirent. Je ressens le besoin de me revisiter. Je crois de plus en plus que les petits ensembles feront l’avenir. -En lisant cela, les souverainistes doivent se pourlécher les babines… - Non, je ne pense  pas au Québec par rapport au Canada ; je  pense plutôt à la Haute-Côte-Nord! Non, je ne vais pas me Rambométamorphoser et vous suggérer de mettre les étrangers dehors! Ce n’est pas ma tasse de thé et de plus, j’étais pourri au baseball ! 


Je vais plutôt  faire un tour de machine. Je gage que vous n’avez pas entendu cette expression depuis des lunes ? Donc, j’aime les tours de machines et les vieilles expressions. Dans ce périple motorisé, j’ai l’impression de faire l’inventaire de mes terres. Parce qu’au cas où vous l’ignoriez, la Haute-Côte-Nord m’appartient. C’est surprenant, mais si ! 


Constat un peu platte de mon inventaire : robustes  panneaux indicateurs torturés, pelouses labourées par des pneus, clôtures arrachées, poubelles renversées, graffitis qui brisent l’espace public, terrains négligés … Messieurs les vandales, on jurerait que vous ignorez que la Haute-Côte-Nord  est une propriété collective ! Et oui, j’ai un peu menti, je ne suis que copropriétaire !  Oui, la Haute-Côte-Nord, vous appartient ! Vous êtes par votre naissance, par votre choix migratoire, par votre seule présence ici, les seigneurs des lieux.  N’est-ce pas extraordinaire d’être ainsi élevés à ce rang sans effort aucun, sinon les labeurs de nos prédécesseurs !   

Nous sommes 10978 seigneurs sur une surface extraordinaire de 11260 km carrés. Batinse! ça fait un kilomètre carré pour chacun de nous ! Notre région est belle de nature, belle de son fleuve, belle de ses diversités, belle  de notre présence … J’arrête, trop de beauté me mouille les yeux!   


Par contre, trop de conneries m’arrachent les yeux! J’ai presque honte d’écrire cette chronique parce que je sais que l’an prochain, je pourrai écrire la même, car trop de connards ne se seront pas approprié leur pays ! J’aurais envie de crier : « Hé ! Le cave, ce terrain de golf, il est à toi, cet aréna t’appartient, cette plage, c’est la tienne, cette promenade, elle est pour tes bottines ! Et la poubelle, hein ?! Tu crois que c’est une décoration ?! » Je préfère me taire ! 


Reste de  l’inventaire destiné aux  touristes : du sable sur une centaine de kilomètres. Ce sable, héritage de la déglaciation remontant à plus de 14,000 ans, est devenu une marque de commerce patentée. La route des plages existe : ce sont les plus belle plages décalifornisées (cali = chaud, fornia = four) au monde. Sur cette route des baleines et des plages, vous rencontrerez  des grains de sable apprivoisés, ils  sont l’essence même des merveilleuses créations artistiques de la Marchande de sable sise à Forestville.   


Dans mon pays, vous marcherez dans le sable et  vous pourrez fouilles archéologiques à l’appui, mélanger vos pas à ceux des chasseurs-cueilleurs qui le foulèrent, il y a 10,000 ans. En mettant le pied dans mon pays, vous découvrirez  que le sable ici se vend à la tonne : sans ce sable  arraché  aux millénaires, pas de pont de la Confédération ! 


M’adressant aux touristes qui ont autre chose à faire que de me lire, je m’adresse aussi à vous,  copropriétaires, qui avez oublié que vous habitez un royaume! Vous devriez vous déguédiner et embarquer dans vos machines pour m’aider à finir l’inventaire ! J’ai compté le sable, il reste les eaux, les rocs, les épinettes, les animaux, les insectes, les poissons …



Les seigneurs ont des droits, mais aussi des devoirs ! À bon entendeur, salut.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire